Le Programme

Le 10 janvier 2025, s’est tenu à la Sorbonne le colloque « Justice et contrat » organisé par la Revue de Philosophie du droit des Editions Boleine sous la direction scientifique de Pierre-Hugues Barré, Arnaud de Solminihac, Sébastien Neuville, Philippe Stoffel-Munck et Henri Torrione.


L’enjeux principal de ce colloque était de rassembler des juristes afin de réfléchir sur les outils juridiques qui peuvent favoriser l’équité des contrats. La question s’est posée de savoir si le consentement peut être érigé en critère ultime du juste et s’il existe une justice qui précède l'accord des volontés et qui donne toute sa force et sa raison d'être au contrat.

Le programme proposait trois panels : À l'aune de quelle justice apprécier le contrat ?, présidé par Philippe Stoffel-Munck, professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne ; Le consentement est-il une source de justice ?, présidé par Muriel Fabre-Magnan, Professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, et Quels instruments pour remettre la justice au cœur du contrat ?, présidé par Gustavo Cerqueira, Professeur à l'Université Côte d'Azur.

Justice et contrat

Les thèses de l'autonomie de la volonté ont depuis longtemps influencé le droit des contrats en France et à l'étranger. Elles sont aujourd'hui relayées par le droit à l'autonomie personnelle : l'homme devant pouvoir se donner sa propre norme, et donner des effets de droit aux conventions qu'il conclut sans que des principes extérieurs et antérieurs à la volonté des parties ne puissent intervenir.

Une telle perspective n'est-elle pas de nature à provoquer une tension entre le consentement et la justice ? N'est-elle pas en contradiction avec l'histoire du droit des contrats qui, jusqu'à ses développements les plus récents, fixe un cadre au consentement ? Comme dans d'autres domaines du droit, la question se pose de savoir si le consentement peut être érigé en critère ultime du juste. N'y a-t-il pas une justice qui précède l'accord des volontés et qui donne toute sa force et sa raison d'être au contrat ? N'est-ce pas précisément l'office du juriste que de dégager ce cadre qui permet au contrat d'être juste ?

En réalité ces interrogations ouvrent un problème presque intemporel : quelles sont les conditions du juste contrat ? Se concentrent-elles sur la phase de formation du contrat ou doivent-elles s'illustrer au fil de son exécution ? Faut-il distinguer selon que le contrat réalise un échange économique ou vise une autre opération d'un autre ordre ? Quels sont les éléments objectifs et les facteurs essentiels qui rendent un contrat juste ? Si « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites », pour Lacordaire « entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit » ; où placer la balance ?

C'est à ces questions que le colloque Justice et contrat a tenté de répondre en se concentrant sur la justice dans le rapport entre parties, sur la manière dont le contrat s'insère dans un ordre plus large – et sur la justice à laquelle il participe, ainsi que sur le thème de la protection (des consommateurs, des locataires, etc...). L'exigence d'un besoin de protection vient heurter l'idée que le contrat serait juste en tant que tel, ou que le volontarisme se suffit à lui-même.

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